Adolescence, cette période insaisissable

Article : Adolescence, cette période insaisissable
Crédit: Monstera
2021-08-12

Adolescence, cette période insaisissable

Désormais, elle marche seule. Elle n’a plus de frères. Elle est bien toute seule. Dans l’intervalle de deux semaines, Jess a perdu ses deux frères. A ce qu’il parait ses deux frères étaient devenus trop dépendants de Gbékui (drogue en Ewé, une langue togolaise).

La famille de Jess est arrivée au Togo suite à la crise ivoirienne de 2010-2011. Elle est la benjamine d’une famille de trois enfants, dont deux garçons (ses grand-frères). Son frère qui la précède a succombé suite à une overdose de Gbégui. Leur frère aîné s’est suicidé par noyade, une semaine après le décès de son petit frère (sans doute se culpabilisait-il du décès de son petit frère ?). Eh bien ! A qui la faute ? La société ? Leur communauté ? Leurs parents ?

Comment un enfant de douze ans, voire quinze ans, peut-il développer aussi facilement une addiction à la drogue ?  A la fac de la Sociologie, j’ai surtout appris à prendre du recul devant tout fait et à l’analyser. D’une manière ou d’une autre, il y a toujours une motivation derrière toute action.

Quelle raison solide peut pousser un adolescent vers les produits psychoactifs ? Le phénomène de consommation de drogues dans la période de l’adolescence est très répandu. D’après le pédopsychiatre Philippe Jeammet, l’adolescence est une période de transition entre l’enfance et l’âge adulte. Elle est considérée comme une des périodes de la vie la plus difficile pour les adolescents eux-mêmes, mais aussi pour les parents, les enseignants ou les éducateurs.

L’adolescence est une période au cours de laquelle on a toujours quelque chose à prouver. Les premières règles pour les filles, les premières éjaculations pour les garçons, ou encore l’acné ne sont pas toujours bien vécues par les adolescents. Personnellement, mon adolescence n’était pas aussi enviable que ça (j’ai quand même vécu de formidables expériences à cette période). Déjà, les premières règles étaient très angoissantes pour moi.

Un matin, je suis réveillée et dans ma culotte de petite fille de moins de douze ans, je vois des traces de sang. Je ne comprenais rien, mais alors rien du tout. J’ai fait appel à ma tante pour lui faire part de ce qui m’arrivait. Dans ma petite tête d’adolescence, je donnerais tout pour m’éviter cette impression de déformation. J’aurais aimé que mes parents me comprennent mieux à cette période. J’ai eu droit à des discours « mathématiques » (complexes). Au bout d’un temps, je me suis faite à l’idée qu’il doit pleuvoir du sang en bas de mon vagin chaque mois.

A cette époque j’étais surveillée de très près. Je me rappelle un jour, mon oncle m’a vue avec un garçon. Arrivée à la maison, j’ai vécu des instants les plus horribles de ma vie. Avec mes yeux d’adulte, j’ai fini par comprendre les parents (ils ont fait de leur mieux pour encadrer cette adolescente que j’étais), même si je ne suis pas d’accord avec les méthodes usées.

J’avoue avoir de beaux souvenirs avec mes copines, aussi folles que moi, mais qui avaient une certaine liberté dont je ne jouissais pas forcément. C’était une belle époque. Avec du recul, je pouvais bien me révolter à cette époque. Cependant, ce n’était pas le cas. Combien d’adolescents ne se révoltent-ils pas dans des conditions pareilles ? Il faut surtout reconnaître que les garçons vivent parfois plus mal leurs adolescences que les filles. Je lisais dans un article que les parents sont en effet, bien involontairement, à la mauvaise place. Ils représentent la dépendance dans laquelle l’adolescence se trouve, et ce dont il doit se libérer, au risque de rater son passage vers l’âge adulte. Mais ils sont dans le même temps les représentants du cadre dans lequel cette transformation doit se faire, garant de la loi symbolique, cadre qui a pour vocation d’être rassurant et de favoriser une transition harmonieuse.

Le phénomène de consommation de drogues au moment de l’adolescence est fortement lié à la mauvaise gestion de l’étape de l’adolescence des enfants. La responsabilité des parents au cours de l’adolescence de leurs enfants est très cruciale. Le drame dont j’ai fait cas à l’entame de mon article est une histoire bien réelle. C’est une situation qui m’a horriblement marquée. Il urge de bien encadrer les enfants pendant leur adolescence, de la meilleure manière possible. On invite les parents aujourd’hui à parler sans tabou de la sexualité à leurs enfants. Il serait également bien que les parents puissent leur parler des produits psychoactifs. Très souvent, pour l’adolescent, la consommation de produits psychoactifs est un rite initiatique pour faire partie d’un groupe de semblables.

Smile 🙂

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